vendredi 15 mai 2015

Le temps de vivre

Reality bites: un film des années 90 qui ressemblait étrangement
aux années ou j'avais l'impression d'avoir une vie

Depuis quelques mois, j'ai l'impression de ne faire qu'exister...c'est le métro-boulot-dodo quotidien de la routine au travail...je suis enterré de travail, que dis-je submergé (ça fait pire dans l'eau que sous la terre je trouve). Je ne vois pas le jour de diminuer la liste de tâches à faire, j'en reporte certaines depuis 2, voir 3 mois...bienvenue dans la fonction publique 2.0, où le volume de tâches demeure le même et où l'ont remplace 1 vieux dinosaure sur 2...mais après plusieurs départs à la retraites, ça commence à nous rattraper, nous les jeunes qui reste. Après seulement 8 ans, je suis devenu le sénior dans le département. La charge de travail ne peut qu'être exponentielle, expérience oblige, du moins, pour moi, mais pas pour d'autres. J'ai lu récemment que "la connaissance venait avec les responsabilités". C'est venu me chercher, rien de plus vrai. L'ignorance, c'est le bonheur, disait Plume Latraverse. En quelque part, il n'a pas tout à fait tort, quand on y pense. On jase là.

J'arrive du travail autour de 18h-18h30 normalement. Le temps de me faire une bouffe, il est 19h et je n'ai fait que cuisiner, me changer de vêtements, vider ou emplir le lave-vaisselle (dawn!) et manger. Le temps de terminer, j'ai réussi à écouter les infos il est 19h30 et je n'ai rien fait d'autres. J'en profite pour relaxer un peu en allant voir la vie palpitantes des autres sur Facebook. Shit, déjà 20h...je dois organiser mon souper meurtre et mystère, payer tel ou tel compte, prendre mon rdv pour le tune-up de la moto, mesurer les coches de mes pneus (sont-ils encore bons?) ah oui, faut pas j'oublis de vérifier comment je peux réparer le patio sur le net...déjà 21h.

J'ai passé mes derniers week-ends...à racler le terrain, puis épandre de l'engrais, décaper et teindre la terrasse (je vous passe les aller-retours à la quincaillerie), sortir le set de patio, ranger la souffleuse, sortir la moto, faire l'épicerie, préparer des lunchs, faire le ménage du printemps...et les corvées régulières de la douche, les toilettes, la balayeuse, les poubelles et le bac de recyclage....

Vous me direz alors: De quoi tu te plains? T'as une bonne job et une propriété, c'est déjà plus que bien du monde. Je sais tout ça, je l'apprécie, sachez-le...je sais que je suis privilégié et l'idée c'est pas de me plaindre la bouche pleine...mais je réalise du coup à quel point on peut "perdre" du temps dans une vie à seulement faire la gestion de tout ce qu'on doit gérer...le boulot, la maison, les obligations...et je n'ai même pas d'enfants, imaginez. Mais pendant le temps qu'on prend pour s'occuper de tout ça, j'ai l'impression parfois de perdre de précieuses années de vie à m'occuper de choses qui une fois que j'aurai trépassé, n'auront plus aucune importance, vous me suivez?

Il me semble (et j'en suis assez certain) que pendant toute ma jeunesse, j'avais tout le temps de "vivre ma vie", de la savourer à fond...avec les amis, les cousins/cousines, la vie en famille, l'école, les premiers coup de foudre, les séances de necking avec les filles...vivre simplement. Je m'ennuis du temps où ma vie se résumait à l'école la semaine et à débarquer chez "C" le weekend, à se demander "On fait quoi? T'as envie d'un film? Pulp Fiction, ça l'air bon hein? Jamais vu. Go, on va le louer" ou "Les boys, on s'en va à la Girafe ce soir...on finit ça chez Ashton" ou encore de se retrouver entre colocs dans le salon à prendre une bière un jeudi soir, à juste jaser, faire des jokes et rire. Ainsi allait ma vie d'avant.

Mais cela ne dure qu'un temps...bien assez vite arrive les pressions sociétales de "réussir sa vie", avoir de bonnes notes, étudier comme un dingue (et s'endetter)...pour avoir une bonne job (sous-entendu payante) pour ne manquer de rien (rembourser ses dettes), puis se caser avec une fille, d'avoir des enfants, un chien et qui sait, un chalet si t'as bien réussi. L'histoire ne dit pas que tout cela vient souvent avec les obligations financières, professionnelles et familiales...

Nous posons-nous la question à savoir pourquoi travaillons-nous comme des défoncés pour payer sa maison à 300 000 $, son Iphone 7, son Dodge caravan avec écran plasma (pour aller porter fiston à l'aréna le samedi matin à 7h) et au final, pour n'avoir 2-3 semaines de vacances par année (déjà booké pour un voyage à Ogunquit)? Nous n'avons pas le temps de s'arrêter pour y réfléchir, nous sommes trop occupé à vouloir réussir notre vie plutôt que de l'apprécier à sa juste valeur. Et n'allez pas croire que jsuis mieux que les autres...je fais parti du lot.

Je me répète souvent de faire attention de ne pas passer à côté des "vraies choses", pour ne pas qu'à la fin de ma vie, il soit trop tard...c'est peut être là qu'origine mes tourments récents...d'avoir l'impression de passer trop de temps m'occuper de choses superficielles qui me paraissent pourtant aujourd'hui incontournables, importantes ou essentielles afin de réussir ma vie...j'imagine que c'est typiquement humain, que je ne suis, au fond, qu'un homme "de mon époque"...mais quelle époque de fou dans laquelle vit-on pour ne plus avoir l'impression de prendre le temps de vivre? Je me le demande. Ça m'inquiète, m'angoisse, m'étourdit, me questionne. J'imagine que c'est (un peu) ça, la crise de la 40 aine. 

6 commentaires:

L'impulsive montréalaise a dit…

Si je te suis ? Je te suis complètement. Et je comprends pourquoi tu te plains. Ce n'est pas que la vie est si mal. C'est qu'elle n'est pas aussi satisfaisante qu'on voudrait qu'elle le soit. En tout cas, moi, c'est ainsi que je me sens. J'ai l'impression qu'il y a plus. Et que ma fatigue, ma routine, mon train-train m'empêche d'aller chercher ce plus.
Ce n'est pas la crise de la quarantaine. J'ai fait cette crise-là plusieurs fois et je suis beaucoup plus jeune que toi :P (fallait que je pousse là-dessus).Je ne crois pas que ce soit non plus cette vie que tu avais étant jeune. Tu n'es plus ce gars-là, tu n'as plus besoin de ce passé-là.
Alors, oui, il te reste une poignée de belles questions. De choix à faire. As-tu besoin de cette maison ? De ce boulot ? De toutes tes choses ? Plus j'avance dans la vie et plus je crois au désencombrement, peu importe la forme qu'on choisit de lui donner. Peut-être qu'il est temps de donner un petit coup de plumeau sur quelques petites choses. Et pas seulement au propre !

On pourrait en discuter longtemps en tout cas...

Kalte a dit…

C'est un point de vue intéressant et qui se défend bien en effet. Non, je n'ai pas besoin d'une maison...mais c'est un choix rationnel, un investissement longuement réfléchit (tant qu'à payer la même chose dans le vide). Ai-je besoin de mon travail? Là, je dirais...oui certainement...mais je ne suis pas fermé (et ce sera probablement le cas si rien ne change), d'aller voir ailleurs...quoique j'adore mes dossiers et que je m'accomplis...c'est juste qu'à moment donné, faut que ça aboutisse, faut que ça change...le blabla, c'est bien, l'action c'est mieux. Malgré ce que j'ai dit, j'essaye "autant que faire ce peu" d'opter pour la simplicité volontaire, d'éviter des achats inutiles et superficiels et de ne pas trop m'encombrer de "obligations domestiques", mais force d'avouer que ça occupe tellement de temps dans une journée, et au bout d'une vie, on réalise le temps qu'on a "perdu" a faire ce type de tâches, plutot que de lire, s'instruire, voyager, écrire, voir des amis. Là où j'en ai, c'est les genres de vies "normalisés" que nous vivons...je pense que c'est sociétal la patente. Et oui, on pourrait en discuter longuement! :) Merci d'être passé, tu repassera! ;)

Kalte a dit…

Ah et oui, je m'ennuis parfois de ma vie d'avant...avec mes amis surtout...mais bon, je sais que je suis ailleurs, et la zappette à voyager dans le temps n'existe pas, malheureusement!

Josie a dit…

Intéressant!
Pour contrer ce sentiment, quand il m'apparait, je me plonge dans le moment présent. Je dois racler des feuilles sur mon terrain (tâche plate mais essentielle, si tu veux toujours un terrain potable l'an prochain)? Très bien. Je salue mon râteau, me présente, copine pour quelques heures, je racle en songeant à ces feuilles qui ont poussées dans cet arbre là, aux chenilles qui y sont passées, au composte qu'elles feront, à mes mains qui prennent position sur mon ami le râteau et la pression que celui-ci fait ici ou là sur les différentes parties de mes mains, sur mes orteils dans mes bottes qui se replient pour me tenir en équilibre, j'hume l'air entrant dans mes poumons, me représentant le chemin de chaque bulle d'oxygène... je conscientise ce que je suis en train de faire. Et surprise! Ça passe vite! parce qu'au bout du compte, j'aime ce que je fais parce que je le fais avec moi, et pour moi. Je me fais un cadeau en préparant mon terrain; l'an prochain, je remercierai Josie-du-passé d'avoir si bien raclé les feuilles.

La vie va si vite, c'est troublant. Arrêter le temps en le conscientisant, c'est ce qui me fait apprécier (presque) toutes mes "obligations". Et puis, quoi que ces obligations soient "imposées" par la société d'aujourd'hui, elles restent un choix, conscient ou non...

Kalte a dit…

@Josie En fait, j'aime bien m'occuper de mon ptit lopin de terre..."mettre ça beau" et entretenir le tout...l'affaire c'est que pendant que tu fais ça, bien, tu fais pas autre chose et le temps passe...il passe vite comme tu dis. Puis on se réveille un matin et on est rendu à 40 ans. On se pense trop souvent éternel quand on est jeune je pense...en fait, je pense qu'on ne réfléchit même pas à cette question là...ça ne fait même pas le top 100 de nos préoccupations. Mais plus on vieillis, plus on prends conscience du temps qu'on a "perdu" à s'occuper de trucs pas si important que ça...mais des trucs que la société nous impose. Bref...pas si simple de s'en sauver...oui t'apprends des choses en le faisant...mais à la longue, maudit qu'on passe du temps à faire en sorte que tout soit bien entretenu...!

Josie a dit…

Kalte, si tu aimes prendre soins de ton lopin de terre, ben c'est ça la vraie vie pour toi. Et quand tu fais ça, tu ne perds pas ton temps parce que tu vibres pour quelque chose que tu aimes!

Faire une seule chose à la fois et bien la faire parce qu'on aime ça, ben c'est ça la vie.

Tiens, une citation que j'aime bien et qui me ralenti parfois :
« Nous avons mieux à faire de la vie que d'en accélérer le rythme. »
- Le Mahatma Gandhi

Bonne fin de semaine :)

La vie est faite de choix. Si vous êtes arrivé ici, c'est que vous l'avez choisi.